Eoliennes au large de Fécamp : 140 000 m³ de béton sous les mers

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D’ici la fin de l’année 2023, 60% des habitants de Seine-Maritime seront alimentés en électricité grâce au parc éolien implanté au large de Fécamp. La production des 71 éoliennes devrait permettre de couvrir la consommation domestique de plus de 770 000 personnes. Le béton est évidemment de la partie sur cette construction ambitieuse de 60 km². La conception des embases des éoliennes est un véritable tour de force.

Plongez dans les coulisses de ce chantier spectaculaire aux côtés de Guillaume André, directeur Normandie chez Lafarge Bétons et Rudy Guillaume, responsable du site de Matériaux Baie de Seine (MBS) au sein du groupe Eurovia.

 

Un parc éolien pas comme les autres

Le projet du parc éolien en mer de Fécamp est le troisième en France et le tout premier en Normandie. Les décideurs ont choisi de partir sur des éoliennes posées, uniquement retenues par la loi de la gravité : une première dans l'hexagone ! Ainsi, chaque socle d’éolienne, les embases, se compose de 800 m3 de béton. L’emprise sur le fond marin représente pour autant moins de 1 % des 60 km² sur lesquels s’étend le parc éolien.

À titre de comparaison, le parc en mer du banc de Guérande actuellement en service au large de Saint-Nazaire se compose quant à lui de fondations monopieu. Le socle de chaque éolienne, en acier, s’apparente alors à une sorte de clou géant enfoncé dans le sol.

 

Un projet d'envergure réglé comme du papier à musique

Le chef d’orchestre de ce projet singulier : EDF Renouvelables. La filiale du groupe d’énergie français a choisi d’être accompagnée par Bouygues Travaux Publics pour superviser la construction du dispositif offshore. Quant à la fourniture du béton, c'est Lafarge Bétons qui a remporté l'appel d'offres et travaille main dans la main avec un acteur local : Matériaux Baie de Seine (MBS) pour les granulats marins nécessaires à la préparation du béton. Bien d'autres entreprises ont évidemment pris part au chantier, sur d'autres corps de métier.

« Nous avons étudié le projet très en amont avec Bouygues » explique Guillaume André, directeur Normandie chez Lafarge Bétons, en charge du dossier depuis 2014. « Cette phase préparatoire essentielle a permis de laisser peu de place à l'incertitude » précise-t-il. En effet, le projet de construction a été réglé comme du papier à musique. Ainsi, début 2020, la production de granulats est lancée par MBS afin de « constituer un pré-stock important pour répondre aux besoins en béton à venir » explique Rudy Guillaume, responsable du site MBS au sein du groupe Eurovia. Juin 2020, Lafarge Bétons entre dans la danse. Deux centrales mobiles construites spécifiquement pour les besoins du projet sont installées tout près de MBS, sur le port du Havre. « Chacun voyait ce que l'autre faisait. C'était transparent et fluide » résume Rudy Guillaume. Grâce à cette proximité, deux camions sont exclusivement dédiés à la livraison des granulats d’un point à l’autre sur quelques centaines de mètres, indépendamment des flux habituels de la zone portuaire. Dès décembre 2020, Lafarge Bétons lance ainsi la production des dalles de béton. La dernière sera coulée en août 2022.

 

Du béton en circuit-court…

Extraits de gisements locaux au large de Ouistreham, Fécamp et Le Havre, ce sont des granulats marins qui ont servi à la production de ce béton 100% made in Normandie. « Nous avons exploité l'ancien lit du fleuve Manche. Il propose un type de roche silico-calcaire, une nature géologique proche de ce qu'on peut trouver sur Rouen » raconte Rudy Guillaume.

Le ciment non plus n’a pas eu à faire trois fois le tour de la planète avant d’arriver sur le chantier. Sorti tout droit de l'usine Lafarge Ciments du Havre, située elle aussi sur le port, ses adjuvants étaient quant à eux fabriqués à Gournay-en-Bray.

 

… et au cordeau

Une fois recueillis en mer, les granulats sont ensuite lavés, criblés et séparés selon leur calibre. Une dernière manipulation très importante ! MBS a même installé un laboratoire en interne pour contrôler la production. Ainsi, tout est mis en place pour garantir un béton uniforme et de grande qualité aux embases. Au total, MBS aura livré 230 000 tonnes de granulats entre décembre 2020 et avril 2022. « L’entreprise est fière d'avoir participé à ce projet. Il fallait montrer que nous étions un acteur majeur et ne pas passer à côté de ce chantier » s’enthousiasme Rudy Guillaume.

De son côté, Lafarge Bétons a produit deux types de béton pour Bouygues TP. « Le cahier des charges exigeait des bétons avec des performances mécaniques élevées et de grandes exigences en termes de durabilité » précise Guillaume André. Les formules béton mises au point pour ce projet de construction présentent également une réduction carbone de 23 à 24 % par rapport à un béton classique, notamment grâce à l'utilisation de laitiers de haut fourneau.

Plus inhabituel : pour respecter ses engagements, Lafarge Bétons a dû maintenir le béton dans une fourchette de températures et donc se montrer créatif : chaudière pour chauffer le matériau en hiver et chillers pour le refroidir l'été. « Nous avons même habillé nos toupies de chaussettes isolantes que l'on brumisait avec de l'eau à 1°C pour les maintenir au frais » se souvient le directeur de Lafarge Bétons Normandie, qui ajoute « contrôler la température du béton au degré près, c'est de la haute couture ! »

Une prouesse rendue possible grâce à une équipe de 15 personnes au plus fort du projet, pendant 15 mois. « Nous avons fait le choix de mixer recrutement externe et mobilité interne » explique Guillaume André. « Toutes les personnes recrutées ont accédé ensuite à un poste au sein de l'agence » précise-t-il.

 

Et pour l’installation : c’est du lourd

Au total, 140 000 m3 de béton ont donc été coulés en flux tendu sur les 30 hectares du port du Havre. Mais la mission ne s’arrête pas là ! Il faut maintenant déplacer les 71 embases de 5 000 tonnes l'unité et les immerger. À partir d'août 2022, les monstres de béton voyagent 3 par 3 sur une barge de Bouygues TP. Les fondations sont ensuite installées sous l'eau par l'un des rares bateaux capables de mouvoir de tels éléments.

La sous-station électrique a quant à elle été posée à l'été 2022 et le réseau électrique raccordé à terre. Mâts et pales des éoliennes viendront ensuite compléter le tableau.

 

 

 

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